25/08/2013
Quelques miettes de pain
Ma vue asséchée de larmes
Devinait le silence tapageur
Des passeurs de rêve
Je ne pouvais me résoudre
A comprendre le monde
Ne comprenant de moi que la surface écorchée du désir
Le vieillissement des pierres
Etait mon refuge ancestral
Ma généalogie
Je me surpris à méditer
Après ce long tarissement de mots
Éclipse verbale salutaire et ombragée
Où le corps ne répond plus
La gorge fermée
Crevasse oubliée et stérile
Où s’accumulent la mémoire et le souvenir
De la vie des hommes
Galaxie imprenable d’une pensée sauvage
A peine élaborée
A peine viable
Le son inaudible mais présent
Comme le crissement d’un bas sur la jambe d’une femme
Le tumulte d’une caresse effleurant la peau
Le trouble du baiser avant le contact
Quelque chose d’indisable
Une parole avortée et cruelle
Qui nous rappelle notre incomplétude
Notre fragile et vulnérable souffle
Evanescence de la volonté de laisser trace
Trace d’un si peu de nous
Comme les miettes de pain
Sur la table après le partage d’un bon repas
Seuls les oiseaux s’en souviennent…
Ce n’est déjà pas si mal
15:02 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (2)
05/07/2013
Coup de Vent
(photo JLG)
J’ai toujours beaucoup regardé les murs de ma chambre lorsque j’étais petit. J’y voyais toutes les angoisses de la vie dans un morceau de tapisserie déchirée Je devrais dire les murs de la chambre cuisine salle à manger. Il n’y avait que deux pièces dans l’appartement. D’ailleurs je n’ai jamais appelé ça un appartement. C’était une partie d’un ancien couvent avec un placard à charbon. Personne ne m’a jamais enfermé dedans, à part moi pour m’isoler et rêver. Mon lit entouré d’un cosy des années cinquante était mon seul refuge. Je vivais avec mon grand père et ma grand-mère avec des souvenirs du début du siècle. Le frère de mon grand-père mort à 34 ans en sautant à cheval d’un pont de la Loire, Le départ à 14 ans de mon grand-père pour la marine à Marseille. Des tas de petits cailloux enveloppés dans du papier de bonbon à savourer avec parcimonie quand l’absence réveille les souffrances d’enfant.
Le temps n’avait pas bien vieilli
Il n’avait pris aucune ride
Mais il sentait pourtant la naphtaline
De quelle époque étais-je ?
Où étaient mes racines ?
J’avais renoncé à la souffrance très jeune
Certes elle m’a bien rattrapée
Mais je l’ai domptée de nombreuses années
Mes mystères me sautaient à la gorge
Comme un repas mal digéré
Une brise du large qui ne s’engouffre pas dans les cheveux
Une ligne d’horizon telle un mur de prison
Qui abolit les perspectives
J’étais triste et heureux à la fois
Cette ambivalence charnelle
Qui dévore toute imagination
Tout projet
Impossible de me projeter dans un quelconque avenir
Y avait-il un avenir d’ailleurs
Un faux semblant où l’on s’évertue à laisser trace
Quelles traces ont laissé les hommes
Qui méritent de vivre uniquement par procuration
Notre imperfection est criarde
L’injustice ne fait plus pleurer que les enfants
Le soleil était toujours trompeur à la terrasse du « café chaud » où nous refaisions le monde. Depuis le monde va plutôt plus mal et nous, nous mesurons notre réussite mathématiquement, numériquement sur un modèle oublié, dépassé qui sent la révolte. J’ai une envie de flipper dans le café du centre avec Raphaël et les trois petits cochons. Une rencontre insolite, imprévue…de celles qui vous font croire que tout est possible. Merci RM.
10:21 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0)
24/03/2013
Une pincée de sel
Le silence panse mes blessures
Et tes mots les cicatrisent
Ta voix est un violon
Qui répare les failles de mon cœur
Il est des frissons qui soignent
L’évidence de notre solitude
L’exil de nos souvenirs
La fragile audition du murmure
Ce mot sans mot
Qui en dit plus que tout discours
Cet avant-Don où l’on s’abandonne
Abandon secret de la vérité
Celle qui charge les épaules de l’homme
Sans jamais lui faire courber l’échine
Don de l’exil des mots
Brûlants notre conscience
Flammèche du Réel qui nous investit
Que j’aime ton sourire sucré
C’est un souffle volatile qui apaise les blessures
Un souffle d’ange échappé de l’archet qui saigne
Quelques notes improbables
Le regard invisible d’une mère
Une caresse inventée qui ne touche que les larmes asséchées du cœur
Une chair frémissante qui oublie sa fragilité
Le regard calme du vent qui se pose sur nous
avec une odeur de terre et d’eau
Le sacrifice de la terre à nous révéler l’indispensable beauté
Que d’incapacité de dénuement à nous ouvrir
A notre propre incomplétude
Je ne veux être qu’une poignée de graviers
Un vent de sable
Qui vous fera cligner des yeux
Un murmure qui ne vous dira rien que vous ne sachiez déjà
Une pause un instant une absence
où rien n’est plus pareil
le reflet pâle des mains d’un homme
les larmes de mon grand père
posées sur la terre où il est né…
le souffle de l’absence
16:34 | Lien permanent | Commentaires (2)
19/03/2013
Le télégramme bleu
(Photo JLG)
Aux rives de notre cécité
Rien ne se dit
Qui n’ait été déjà dit
Les mots cloués aux rides du soleil
Pleuvent les larmes
A déchirer l’oubli
Il reste quelques mensonges
Comme des brûlures sur la peau
Les pensées de l’ombre
Qui ne se prêtent pas à sourire
Envahissent nos corps
Palpitations répétées
Des empreintes indélébiles
De nos insomnies
Cauchemar du réel
La terre a la migraine
Mes rêves de monde bleu
Sont en apnée
Et je fais des tas de souvenirs
Comme on partage après un holdup
Je ne sais plus qui sont les voyous
Les acouphènes du bonheur
Me sont devenus étrangers
Un rai de lumière
L’ombre d’une fissure
Mes seuls vrais compagnons
Ont désertés ce monde
Et pourtant je ne me résous pas
A espérer et à aimer
J’attends le télégramme bleu
Qui annonce le réveil
17:33 | Lien permanent | Commentaires (0)
03/03/2013
Il...
La marée dessèche
La couverture de mes yeux
Je n’y vois plus
Que le calme trompeur du silence
Un silence de mort naissante
De ceux qui apaisent le tumulte
Des angoisses répétées de l’enfance
J’ai accumulé dans mes poches percées
Plus de galets que de souvenirs
Chacun a sa vérité, sa puissance, ses faiblesses
Ils se sont dispersés lors des grandes marées
Certains ont passé la barrière de corail
Pour se perdre sur la plage
Pour que ma main les saisisse les caresse
Avec la certitude de l’importance du geste
Avec la ferveur des lendemains sans lendemain
Qui nous parlent avec les vrais mots du cœur
Chapelet de petites pierres
Qui ressemble à ma vie
Chapelet de rêves ancrés dans le sable
Comme les mots de ma bouche à ton oreille
Ne rien dire d’essentiel
Que la vérité de nos rencontres
Dans le fracas de l’absence
17:30 | Lien permanent | Commentaires (3)
16/12/2012
Le coeur de la terre
(Photo JLG)
J’ai arraché le cœur de la terre
Les mains meurtries par ses veines blondes
Ses rondeurs dissimulées en larges sourires de chair
J’ai cru pouvoir me mesurer
A ces forces immobiles et accueillantes
Intemporelles et sacrées
Fracture de sable écorchée
J’ai écarté les paupières lisses et lourdes
Du regard de la terre
Pour y voir une image éphémère
De notre incomplétude
Le fond des océans reste résolument calme
Des odeurs de terre après l’orage
Envahissaient l’air que je respirais
Des odeurs de miel d’herbe lasse
Se mêlaient à celle des cahiers de mon enfance
Et du pain d’épice beurré
De goûters interminablement longs
Qui annonçaient la veillée
L’onglée me montait aux oreilles
Comme un mauvais rêve, un frisson maladif de l’hiver
Et nous révèle notre vulnérabilité
La pierre brillait entre mes doigts
Palpitante
Cœur ouvert aux lèvres des anges
15:55 | Lien permanent | Commentaires (4)
02/12/2012
Histoire de...
(détail peinture Suret-Canale. Collection personnelle)
Il avait repris ses crayons de couleur
Il s’efforçait dans un élan ombré d’espoir
De circonscrire la tumeur incolore pénétrante
Dans une précision chirurgicale du trait
Comme lorsqu’il était enfant et qu’il ne fallait pas dépasser
Il parlait mal le français mais la musique de sa voix
Eclipsait l’incompréhension
Je compris que c’était pour sa fille
Mais le coloriage n’a pas de frontières
Et sa fierté à me montrer le dessin
Appliqué, pour lequel il avait passé la journée
M’a arraché des larmes scintillantes
De partage d’une émotion rare
Où quelque chose de familier m’avait été transmis
Un lien de filiation réinventé
Par des taches de crayons de couleur
Comme une peinture qui vous paralyse
Vous catatonise l’espace d’une fulgurance
Un mimétisme tellurique
un vrai moment sacré
un de ces instants magiques
où le vent et la terre nous sourient
où la parole est inutile.
15:52 | Lien permanent | Commentaires (0)
01/11/2012
IL Y A DES JOURS...
(Photo Jean-luc De laguarigue)
Il y a des jours, comme ça
Où la vie est rebelle
L’océan se resserre
Comme une poignée de main
Sur les cheveux d’une femme
la morsure de l’aube
Sur des lèvres à peine ouvertes
Plissées par la nuit, une voyelle inaudible
à fleur d'eau
Alors qu’il ne fait pas froid
Le gel de l’absence scarifie mon corps
Je suis un oublié de l’exil
Sans mémoire
Un chardon traversant l’hiver
Sans reconnaitre les siens
Un cliché surexposé jauni par le temps
Une ride
La même ride
Qui autrefois te faisait rire
11:03 | Lien permanent | Commentaires (0)
08/10/2012
Des berges sans rives
Éclaire ce que tu aimes
Sans toucher à son ombre
Christian Bobin
Je suis né un jour de crue
Sur les bords de la Loire
Un jour de lumière interdite
Éblouissante comme la mort
Un jour d’hiver
Plié dans les draps de l’été
Un jour de paumes ouvertes
Où le feu de la peau
Convoque
Le cœur du réel
08:50 | Lien permanent | Commentaires (0)
02/10/2012
NI DIEU, NI MAÎTRE
(Photo JLG)
Que les vergers, que les champs ont d’attraits !
Que la retraite au sage est nécessaire !
Dans mes jardins, sous mes tilleuls épais,
J’ai retrouvé la Nature et la Paix.
J’y foule aux pieds les erreurs du vulgaire ;
Et détrompé du faste des Palais,
Je sais enfin, sous mon toit solitaire,
Apprécier les faveurs de Palès.
« LA DUNCIADE – Chant III » Alexander POPE Ed 1781
J’ai des mots plein la bouche
Ecrasés par le silex du cœur
Hémorragie répétées des cris des hommes
La sieste obligatoire de mon enfance, ce pavé qui a ébranlé toutes mes croyances
Je construis ma peine
Comme un vieil acariâtre qui n’en finit pas de gémir
Je me raconte les histoires de mon grand-père comme s’il vivait encore dans mes mots ordinaires
L’homme est cruel
Qu’il se réclame de Dieu ou du Diable
Il n’en finit pas de se détruire lui-même
J’ai croisé l’église de Dieu par inadvertance, je n’en ai gardé que la paix et la certitude du doute persistant, la nécessité absolue de la solitude, la singularité étouffée
La clairvoyance intime que rien ne nous appartient
Que le pouvoir est un leurre pour égocentrique maladif
J’écrasais les fourmis au marteau, j’en ai culpabilisé longtemps
Je ne me reconnais plus en eux
En moi
Gamin turbulent et secret qui cherche un père
Je suis ce fil tendu par l’araignée
Entre deux branches mortes
Un miroir de faille fragile et précaire
Une toile qui voile les yeux des hommes
Éructation symbolique de notre incomplétude
La terre pleure quand les ruisseaux se gonflent du sang des hommes
De l’anévrysme inacceptable de la mégalomanie religieuse et humaine
Le sémaphore au bout de la lande était mon royaume
Silence tapageur vide de sens
Qui engloutit tout et chacun
J’aimais cette douceur de la Loire et ses pièges familiers
Fendre la mer et oser
Rayer les sables blonds au bord des tombants
Vertige insolite et passager
Où prêt à mourir je me sens vivre
Capter ces moments épileptiques
Qui façonnent le terreau du cœur
Ces fulgurances égocentriques
Où les blessures nous appartiennent
Engloutir la terre comme son pays d’origine
Ne rien avoir et tout posséder
Etre une larme posée en équilibre entre deux pierres
Trace indélébile de notre passage à la vie
Dans chaque bille échangée dans les cours de récréation
Une partie de notre histoire
Se transmet de l’un à l’autre
La mémoire nous survit
Rien d’autre
Nous ne sommes que les rejetons du silence
11:05 | Lien permanent | Commentaires (0)
04/08/2012
Le poète a toujours raison
“écrire le jour, ses odeurs, ses lueurs, ses rumeurs. Ce qui s’approche, s’éloigne” et le lieu même de cet enjeu : le poème “comme une fenêtre. Un petit rectangle de mots qui donne sur ce qu’on ne sait pas”… Jacques ANCET
Entends la chanson
De mon cœur
Elle ouvre des petits carrés de mots
Comme des fenêtres ouvertes
Des souvenirs de rues
L’absence toujours présente
De l’infime si peu infime
Accumulation de « si peu de choses »
Qui remplissent une vie
J’ai asséché le dictionnaire de mon corps
Pour te parler avec les éclats de roche
De mon cœur
Mon aphonie te raconte
La fragilité d’être au monde
Ces si longs silences de l’âme
Qui se dispersent
Comme autant de rêves
A réinventer, à s’approprier
Tu lis en moi l’illettrisme de mes sentiments
Mes déserts et mes tempêtes
Les seules choses insaisissables
Que je possède vraiment
Que je te donne
09:13 | Lien permanent | Commentaires (2)
05/06/2012
Parole d'avant les mots
"Toute création vient de la scène, trouve sa traduction et ses origines mêmes dans une impulsion psychique secrète qui est la Parole d'avant les mots"
Antonin Artaud
Ma mémoire n’a plus de voix
Je cherche dans la pierre
le premier cri le premier mot
l’articulation d’avant les mots
au levant du refus de l’audible
je contemple l’écume de tes gestes
de la graine ensevelie
l’empreinte d’un regard
je bois à tes larmes
l’esquisse d’un sourire marin
je tâtonne dans le noir
à la recherche d’un éclat incertain
une promesse d’humanité naissante
un cristal de vérité
le primitif appel
des matins sans lumière
d’une image dans les flaques
que la pluie disperse
je cherche les mots qui ne mentent pas
10:55 | Lien permanent | Commentaires (2)
22/05/2012
Les larmes des Hommes
(photo j)
Comme un parapluie retourné
J’entends le son du silence
Les paroles retroussées de la vérité
Les larmes séchées de l’espoir
Je n’y crois plus
Depuis longtemps mes yeux
S’accrochent à la terre
Un vieil air de blues
Et ça y est
L’émotion partage
Mes incertitudes
Je veux devenir vieux
Vieux de corps et d’esprit
Comme un cadeau anachronique
De notre civilisation
Les blessures profondes
Se lisent sur ma peau
Les fracas de mon cœur
Ternissent l’éclat de mon regard
Baleine de parapluie qui résiste à tous les vents
J’ai jeté la toile
Pour laisser passer la lumière.
10:01 | Lien permanent | Commentaires (0)
11/05/2012
Lire
(photo-texte JLG)
Un voile déchiré sur la plaine naissante
Un nœud de la voix qui efface les litiges
Une ombre indélébile du silence
Sur le passage des hommes
Je rassemble les grains de vie
Abeille laborieuse des sourires à inventer
Laboureur des émotions
Donner force à l’impensable
Qui réduit les vents de mer
Et couvre d’écume les cœurs les plus révoltés
Un souffle ensevelit la naissance du jour
Nous ne sommes qu’à nous-mêmes
Cette lueur ce reflet incandescent
D’une main tendue caressant
un cœur inondée de vagues palpitantes
ma vie entre vos mains
confiance intime du regard
que je noue, écharpe avec des mots lents
inaudibles et aimants
perce une fragilité essentielle
qui nourrit mon quotidien
mon voyage n’est que la répétition singulière
du bleu des mots insensés de courage
qui partagent les larmes obscurcissant le rivage
pulsion scopique qui me rassure
et invente mes lendemains
14:33 | Lien permanent | Commentaires (0)
25/03/2012
J'étais la terre
À cœur ouvert (3)
Le réel est injuste
J’avais besoin en ces temps de reconnaissance
« De ces belles personnes qui font du bien au monde »
Je pensais creuser la terre frénétiquement
Pour y trouver la paix
Effleurer ma peau du dessous
celle qui garde les blessures et les absout
celle originelle qui nous drape des amours infantiles
amours de violence et de vérité
la peau du toucher
la peau de la reconstruction
la peau du feu qui nous consume
et nous fait renaître à nous-mêmes
peau à peau je redécouvre la langue
mot à mot je réapprends la respiration
lente et ample des matins où l’on croque la vie
j’écorche la pierre tranchante du réel
sans savoir ce que j’attends
en sachant ce qui m’attend
j’ai refermé le grand livre
des souvenirs des amertumes des mémoires
comme on quitte un livre
impossible à écrire
J’étais la terre
Ce visage unique refermé
Sur le pas des hommes
08:36 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0)
11/03/2012
Suite...
à Cœur ouvert (2)
La pluie traversait mes yeux
Je ne discernais plus l’ombre du silence
Je parlais sans un mot
De l’aube du sourire
D’une peau à ma peau collée
Aveuglé par mon émoi
J’apprenais à naître à l’autre
Dans l’épaisseur d’un miroir brisé
Funambule sur la tranche du désir
J’abordais la vie à cœur fermé
Dans un copeau de ciel bleu
Je m’irritais de ne pas dominer la terre
Les blessures sont faites pour se rouvrir
Printemps silencieux de nos faiblesses
Je criais à cœur perdu
à l’infamie de nos souffrances
quand même la terre ne vacille d’aucun émoi
Je retrouvais un ami d’enfance
légendes des âges où l’on donnerait son cœur
sans partage
sédiments des matins sans brume
des levers insouciants
où le monde nous appartient
vertige des vestiges de nos croyances
quand nous refaisions le monde
et que le monde nous épargnait
j’avais oublié la cruauté de nos fantasmes
la blessure des draps pliés sur la peau
au matin d’un réveil en sursaut
livide et vulnérable de n’être
que l’image blafarde de l’enfant
qui s’épuise en nous
je ne restais pas insensible au vent
qui décoiffait mes rêves
10:13 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0)
18/02/2012
à Coeur ouvert (1)
J’ai ouvert le grand livre
De souvenirs drapés de silence
de chuchotements et de murmures
Le froid était inqualifiable
ce 11 février 1954
Ce n’est pas sans angoisse
Que j’ai retrouvé le geste chirurgical
Écarter un à un les plans successifs de ma mémoire
Dépoussiéré ces moments superflus
Qui donnent consistance au présent de la vie
Les vagues de mon cœur sont intarissables
ce reflet du soleil qui masque l’essentiel
Disséqué les douleurs et les joies
Pour repeupler d’amour et d’herbe fraîche
L’érosion renouvelée des falaises de mon corps
Je suis traversé par les marées
D’où je puise ma terre
Ce cristal insolent et mystérieux
Qui façonne les berges de mes mots
J’ai mis les pommes de terre à cuire
L’odeur volatile de leur peau ranime tous mes chers disparus
Dans la simplicité des gestes échangés
Des regards parfois des paroles
Tous ces visages croisés rencontrés
Comme les perles chargées d’humanité
Enfilées au fil des ans
Comment ne pas succomber
A cette richesse entassée prélevée pillée
A votre histoire qui est aussi la mienne
Fertilité de vos écumes sédimentées
Je combats les bas-ciels
A cœur de fleur
14:48 | Lien permanent | Commentaires (2)
01/02/2012
Blanc...
Un voile de blancs
Provoque nos consciences
Epaisseur éphémère de nos doutes
Des blancs profonds aux blancs lumineux
Réveillent nos noirs insoumis immortels
Nous traçons avec un doigt d’enfant
Les stigmates de notre présence
Grain de sable dans le désert
Recueilli au coin de l’œil
Notre relative puissance à exister
Interroge le temps qui nous échappe
Horloge détraquée de nos certitudes
Je me perdais dans ces blancs
Dont la différence était autant tactile
Que visuelle
Un sein maternel introuvable
L’émotion pouvait s’y nicher
S’inventer en strates successives
Sédiments des origines de nos mensonges
Et de notre incomplétude
Matrice insolente de nos palpitations dérisoires
Les larmes induisaient l’espoir
Inspiraient un narcissisme à peine dissimulée
Le blanc avait gommé le blanc
Il respirait notre aphonie
Secs comme les pierres
Nous pouvions recommencer
A nous croire vivant
07:18 | Lien permanent | Commentaires (2)
29/01/2012
Rien ne justifie la peur
Mon grand-père m’avait arraché à ma mère
Comme on sauve un enfant de la noyade
Comme on arrache une dent avec un fil relié à la porte
Pour un petit fils de boulanger être un « bâtard » n’avait rien d’humiliant
L’idée de cette irréelle unicité ne semblait pas me déranger
Cette solitude fondatrice m’accompagne toujours
Et la lecture de mon acte de naissance reste une énigme
Une vacuité plutôt, l’absence graphique qui inaugure une parole
Ma parole
Tout semblait se jouer entre ces trois protagonistes
Sans accord, sans un mot, tacitement, juste ce qui lie un père à sa fille engrossée précocement
Une alliance qui m’échappait et leur échappait aussi
Une banale histoire de vie de village que nous avons pourtant quitté très vite
J’ai toujours vénéré cet homme, parole vivante, qui m’a porté une admiration sans bornes
Chaque matin je pense à lui et il a beaucoup contribué à ce que je suis
A ce que je ne suis pas aussi
Sa présence m’envahit encore aujourd’hui
Je sais pourtant, sans jamais en parler, que la femme qui m’a le plus aimé
Le plus choyé, étreinte des silences à porter, des blessures dont elle ne dira jamais rien
C’est ma grand-mère
Femme de l’ombre, discrète et soumise, moins éloquente
C’est toi qui enlevais mes chaussures quand je revenais le mercredi soir de la piscine Blomet, juste capable de m’affaler sur mon lit pliant.
C’est toi la laborieuse du petit matin jusqu’au soir très tard qui t’occupais de moi
C’est toi qui m’as donné le nom de mon père pour le trouver puis le perdre
J’avais souvent honte d’être accompagné d’une « vieille femme » de 42 ans à l’école des Renaudes, dans le quartier où tu étais concierge, rue de Chazelles, dans ce très bel immeuble qui a été si longtemps ma plus belle cour de récréation du monde, entre le parc Monceau et les grands magasins.
Tu es partie ce jour de… (Je ne sais même plus quand c’était) après ma dernière visite et un bon repas très déséquilibré où tu gardais toujours le meilleur pour moi. Tu m’as fait signe de partir quelques minutes, comme par pudeur, pour pouvoir mourir tranquille, rassasiée de ma venue.
Je te savais heureuse. Je savais que tu m’attendrais
Si, je m’en souviens maintenant c’était l’année de mon mariage
Je n’ai lu aucune angoisse sur ton visage lisse comme ta vie. Nous t’avons allongée près du grand père, une évidence. J’ai gardé tous les dessins de l’arrière-grand-père Besnard, ton père et c’est tout.
J’ai vécu des années sans peur…
18:00 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0)
15/01/2012
Il était une fois...
J’avais appris la permanence des pierres
Comme les mots à la commissure de mes lèvres
Toujours un galet ou un cristal dans la poche
Quelque chose où je peux m’agripper quand la froidure du temps et des sentiments me rendent vulnérable
Et aux quatre coins de la maison
Des accumulations inutiles
Je fais des tas me dit-on
Des tas de tout
J’aime bien les tas, ça me rassure
Des petits tas comme on marque son territoire
L’aspirine dans le tiroir du buffet mélangée avec des piles électriques, quelques pièces de monnaie et d’anciens tickets de caisse
Des publicités qui s’entassent sur la table en sachant pertinemment qu’on ne les lira jamais
Les pierres aussi s’entassent
Je parle aux pierres
Aux cicatrices cristallisées de leur histoire
J’ai l’impression qu’elles me comprennent mieux que les hommes
Elles savent écouter inlassablement sans se fendre
De temps en temps seulement elles vous répondent
C’est très rare et quand ça arrive
C’est encore mieux que l’opéra de Verdi qu’interpréta Riccardo Muti à Rome en mars dernier et qui m’a fait pleurer de bonheur
Encore mieux que le point d’eau du Ténéré que nous cherchâmes des heures et des heures alors que la soif nous tenaillait
C’est magique
Un instant de fulgurance intime avec l’aube des mots
Une parole que rien n’efface
Une rencontre de l’insolite qui vous réconcilie avec le vrai discours des hommes
C’est l’inaltérable
Fureur volatile de vie qui trace une conscience et nous rend un peu meilleur
Humble exilé de la terre
Où le temps se fige
Accumulation incongrue de souvenirs qui bâtissent une tranche de vie unique et singulière
Deux regards complices
Deux mains qui se serrent
Deux sourires qui s’échangent
17:20 | Lien permanent | Commentaires (4)