07/11/2007
Gamin de Paris
Passer si près de la mort
C’est passer si près de la vie
Etre en son cœur même
Se rappeler les toits de Paris
Que nous parcourions enfants
Quand la nuit nous surprenait
Et que le gris des ardoises et du zinc
Illuminait nos pas.
C’est le retour par les
Bouquinistes des quais de Seine
Et nos envolées lyriques avec un passant
C’est le 32 rue de Chazelles
Où j’ai appris autant qu’à l’école
Une grand mère concierge
Dans un immeuble du 17ème
C’était une chance, tout le monde
M’aimait et se mettait en quatre
Pour me faire plaisir
Du médecin à l’avocat
Du mannequin au russe blanc,
Monsieur et Madame Tchakotine
Je me souviens de ce nom
Qui me faisait voyager
J’avais six ans et déjà les plaines du Caucase
Dans mes yeux de petit garçon.
Et comme j’étais impressionné d’entrer chez eux
Tous ces tapis, tous ces vases immenses décorés
Une odeur épicée et inconnue presque magique
Un autre monde déjà.
Cette vieille dame du 1er qui me donnait
Une larme à l’oeil
Tous les timbres Grecs
Qu’elle recevait de son fils
Il y avait aussi le chauffeur du patron de casino
Dans la rue juste en face
Qui passait plus de temps sur le trottoir
Que dans la voiture du boss
C’est lui qui m’a expliqué
Avec sa chaussure noire vernis pointue
Que la terre tournait sur elle-même
Nous restions des heures à regarder
L’ombre recouvrir sa chaussure
Ou l’inverse.
Déjà ombre et lumière
Habitaient mon esprit.
Et ma maîtresse de la rue de Renaudes
Avec ses longues tresses blondes
Qui me regardait avec tendresse quand je la dessinais
En couleurs sur la grande feuille de papier Canson,
Je ne dessinais qu’elle et mes dessins
Etaient exposés dans le hall d’entrée de l’école.
C’est aussi le 59 rue Rouelle
Où j’avais deux copains plus grands
L’un m’apprenait à construire
Des guitares électriques
et à voler dans les magasins
l’autre me rapportait des photos authentiques
de Leny escudero avec sa coupe façon Beatles
que j’ai retrouvés l’autre jour
avec plein de photos de moi
qu’il avait faites à la sortie de l’école
près de l’ancienne usine Coca Cola
pas loin du quai de javel,
là où j’allais voir les clochards
qui me parlaient de leurs chagrins d’amour
ou du sens de la vie.
Ils me mettaient des rêves dans la tête
Qui ne m’ont plus quittés.
La vie c’est aussi cette résurgence de souvenirs
Accompagnée d’émotions encore très vivaces
C’est aussi cette Algérienne qui habitait en face rue Rouelle
Qui s’était jeté de la Tour Eiffel du second étage
Et que ses grandes jupes avaient plaqué au premier étage
Accrochée par un membre…
Depuis je la voyais avec sa jambe plastique
A peine visible
Et j’aurais voulu lui parler
Lui demander ce qui s’était passé dans sa tête
Mais je n’ai jamais osé
Et chaque jour j’ai essayé de lui parler
Mais bien sûr elle ne le sait pas…
C’est pour tous ces silences écorchés
Ces absences involontaires et volontaires
Ces ratés de la vie, je veux dire mes ratés
Toutes les fois où j’aurais pu rendre
Ce qu’on m’a donné sans désir de retour
C’est pour tout cet innommable
Que j’écris encore un peu
Pour le bonheur bleu
Que les vaches rousses savent me donner
Pour les talus d’herbe et de feu
Où je peux me rouler
Pour les pierres qui savent si bien dire
Leur histoire et ne trichent jamais
Pour le feu dans les herbes
Et les herbes dans le coeur
Pour tous ceux que j’aime
Mais surtout pour tous ceux qui m’aiment
Et à qui je ne sais pas rendre cet amour.
Je ne saurais oublier le parc Monceau
Où je me laissais enfermer le soir
Pour découvrir tous les endroits magiques
Où se retrouvaient
Les amoureux.
06:50 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (7)
Commentaires
E.M.O.U.V.A.N.T !
"Etre en son coeur même" quelle belle phrase !
Et "Le bonheur bleu" te va bien.
Merci Jean-Luc
Écrit par : Ile | 07/11/2007
Surtout des jeans bien rangés. Et des serviettes dans le cabinet de toilette. C'est comme ça qu'il s'est fait connaître. J'aurais pu inclure ce morceau dans "Catalogue de mode", ou bien dans le roman là avec le truc des cow-boys qui était fait pour rire.
Malgré la confiance qu'on lui a accordé, ça n'a pas suffi. C'est la dernière fois qu'il a rangé les vêtements à leur place. La dernière fois qu'il a "fait la caisse". La fois dernière qu'il a souri au petit black chargé de la sécurité. La dernière fois aussi qu'il a regardé discrètement le tatouage à la cheville de Noémie, sa collègue depuis peu. C'est la dernière fois tout. Tout d'un coup. C'est comme ça...
... http://andy-verol.blogg.org
Écrit par : Andy Vérol | 08/11/2007
Merci Ile ,tu sais combien le chemin de la reconstruction
est pavé de bonnes et de mauvaises intentions... reste des mots alignés où j'essaye de sortir de mes sentiers battus et de m'approcher de l'essantiel. Amitiés
jl
Écrit par : JLG | 08/11/2007
J'aime bien les vrais-faux intellos
les vraix-faux culs
les vrais-faux commentaires
mais pas la vérole
Aussi je te remercie de ton passage
sincèrement...eh oui! vraiment
jl
Écrit par : JLG | 08/11/2007
la fin est très "éluardienne" :-)
c'est bien de garder de tels souvenirs et de les écrire avant que ...
joli suite
bravo à toi
le bonheur bleu et les vaches rousses sont un bel arc en ciel
Écrit par : marco | 11/11/2007
Magnifique cette plongée. Tu viens de me donner une idée.
Écrit par : BT | 15/11/2007
Cette photo, mon dieu, comme elle me parle.
Écrit par : BT bis | 15/11/2007
Les commentaires sont fermés.